Traumas dentaires et football

  • Par
  • Publié le . Paru dans L'Information Dentaire
Information dentaire

La précédente revue de presse a montré qu’une mauvaise santé dentaire pouvait favoriser des blessures répétées chez les foot­balleurs de haut niveau. À l’inverse, la pratique du football peut aussi être la source de traumatismes dentaires. Le plus célèbre eut lieu à Séville en 1982 lors de la demi-finale de la coupe du monde opposant la France à l’Allemagne. À la 57e minute de jeu, Patrick Battiston, lancé par Michel Platini, file vers le but adverse quand le gardien allemand, Harald Schumacher, le percute de plein fouet. K.-O. sur la pelouse, il sort sur une civière avec deux dents cassées et une vertèbre fissurée. La France perdra le match lors des prolongations.
 Bien que le football ne soit pas un sport violent, les contacts physiques dans les duels pour disputer le ballon présentent un risque de blessure cranio-faciales, en particulier dans les duels aériens avec des impacts coude contre tête qui en constituent la principale cause. Le but de cette étude est d’évaluer l’occurrence des traumatismes dentaires chez les joueurs professionnels de football et le niveau des moyens de prévention mis en œuvre.
 
Pour la réaliser, des questionnaires ont été envoyés aux 40 clubs professionnels brésiliens de première et seconde divisions à propos de la prévalence des traumas dentaires subis pendant les matchs, de la conduite adoptée par le staff médical, de leurs connaissances relatives aux protège-dents et de la présence d’un chirurgien-dentiste dans le staff médical. Parmi les 38 réponses reçues, 71 % des médecins avec au moins une année d’expérience ont vu au moins un traumatisme dentaire et 29,6 % d’entre eux en ont vu plus de quatre. Les fractures dentaires sont alors le plus souvent constatées (74,1 %) suivies par les expulsions dentaires (59,3 %). Les joueurs les plus concernés sont les attaquants (59,2 %) et les défenseurs centraux (44,4 %) qui se disputent le plus âprement le ballon dans la surface de réparation où ont lieu le plus d’accidents. Concernant l’attitude des staffs médicaux face aux expulsions dentaires, 76,6 % des médecins des équipes pros estiment qu’une dent peut être réimplantée jusqu’à six heures après le trauma ou ignorent le délai imparti qui, selon l’Association Internationale de Traumatologie Dentaire, ne doit pas excéder une heure pour espérer un pronostic favorable.
 
Le fait que seulement 52,6 % des équipes médicales intègrent un chirurgien-dentiste peut expliquer ce manque de connaissances. Le port obligatoire de protège-dents dans différents sports violents (boxe, rugby, football américain…) réduit le risque de trauma dentaire. En football, où ils ne sont pas obligatoires, la prévalence des traumas dentaires est plus importante que pour d’autres sports réputés plus violents. Plusieurs études citées ont montré l’insuffisance de sensibilisation des joueurs aux mesures préventives, en particulier au port des protège-dents. 47 % des médecins des staffs n’ont aucune connaissance en matière de protège-dents, et seulement 21,6 % en recommandent le port régulier. Parmi les principaux freins, les difficultés à respirer, à communiquer ou l’inconfort ressentis sont les plus cités, de même que le manque de conviction sur leur efficacité. Pourtant, une méta-analyse a montré que le risque de traumatisme oro-facial est 1,6 à 1,9 fois plus important dans le sport en l’absence de protège-dents. De plus, ceux réalisés sur mesure constituent la meilleure option du point de vue de la protection et du confort sans causer de difficultés respiratoires ni gêner la communication. Les auteurs de cette étude pointent le manque de connaissance des staffs médicaux concernant la prévention et la gestion d’urgence des traumatismes dentaires dans le football professionnel. Ils recommandent l’intégration d’un chirurgien-dentiste dans toutes les équipes pour développer ces aspects.
 

Commentaires

Le port des protège-dents est souvent insuffisamment considéré dans le sport professionnel, mais aussi dans le sport amateur ou de loisir. En dehors des sports de combat (boxe, arts martiaux, etc.), les pratiquants sont assez peu sensibilisés aux risques exposés et aux types de protection envisageables dans les sports collectifs où les contacts sont fréquents comme le handball et le football. Les sportifs amateurs ou occasionnels sont particulièrement exposés du fait d’une moindre maîtrise de leurs mouvements, même si l’engagement physique y est moindre. Par ailleurs, l’inconfort lié à l’expérience de protège-dents standardisés du commerce décourage souvent les rares personnes qui ont tenté cette démarche préventive. L’action principale du protège-dents est d’éviter ou de limiter les traumatismes dentaires liés à la percussion violente de deux arcades l’une contre l’autre, plus que la protection vis-à-vis d’un coup direct. Le type d’occlusion constitue un facteur de risque déterminant, en particulier les situations de bout à bout où le risque de fracture dentaire est maximal. Il convient donc d’être particulièrement vigilant chez les adolescents en cours ou en fin de traitement orthodontique qui peuvent fréquemment se trouver dans cette situation avant l’engrainement final. Le chirurgien-dentiste doit jouer un rôle de prévention et de mise en garde face à ces risques en considérant les activités pratiquées par les patients et le risque occlusal. Des solutions préventives sur mesures peuvent alors être proposées pour chaque situation particulière. Le port d’un protège-dents sera en effet plus facile dans la pratique du handball par exemple, où la rotation des joueurs est fréquente et les séquences de jeu plus courtes, qu’au football dont la pratique implique 45 minutes consécutives sur le terrain et nécessite une communication permanente entre les joueurs. Par ailleurs, le port d’un système orthodontique complique le port des protège-dents et des mises en garde doivent être rappelées concernant les risques de certaines activités sportives dans une situation où le risque est majoré par l’inflammation ligamentaire chronique et la situation occlusale en évolution permanente. D’autres activités de loisirs à la mode chez les adolescents telles que le skateboard ou le roller doivent faire l’objet de conseils de prévention vis-à-vis du risque de traumatisme dentaire et de ses conséquences.

Thèmes abordés

Commentaires

Laisser un commentaire

Sur le même sujet

Revue de presse

Article réservé à nos abonnés Châssis de prothèse amovible : cobalt-chrome ou alliages de titane ?

En prothèse amovible à infra­structure métallique, les alliages Co-Cr constituent le matériau de choix par ses propriétés de résistance et...
Revue de presse

Article réservé à nos abonnés Sécuriser ses décisions thérapeutiques

L’exercice quotidien d’omnipratique nous conduit fréquemment à nous poser la question de la réalisation d’une intervention en accord avec les...
Revue de presse

Article réservé à nos abonnés Leucoplasie orale et imiquimod

Limiquimod (analogue nucléosidique de la famille des imidazoquinolines) est un immunomodulateur dont l’activité repose essentiellement sur son rôle de ligand...
Revue de presse

Article réservé à nos abonnés Crête osseuse atrophiée et reconstruction pré-implantaire : greffe autogène ou xénogène

Depuis son avènement au début des années 80, l’implantologie moderne connaît un développement continu et exponentiel grâce à une meilleure...
Revue de presse

Quand l’alpinisme inspire l’orthodontie

L’objectif de cet article est de présenter, sous la forme d’un cas clinique, un nouveau dispositif d’ancrage postérieur mandibulaire par...
Revue de presse

Article réservé à nos abonnés Presse internationale : rencontre avec les Drs Sylvie Lê, Sara Laurencin-Dalicieux et Charlotte Thomas

Article commenté Lê S, Laurencin-Dalicieux S, Minty M, Assoulant-Anduze J, Vinel A, Yanat N, Loubieres P, Azalbert V, Diemer S,...